REPRODUCTION DE LA TRUITE COMMUNE, UN MOMENT D’ESPOIR DANS LA RIVIERE

Nos cours d’eau sont toujours habités par une population de truites sauvages autochtones, une souche patrimoniale dite ‘méditerranéenne’. Ces truites ont colonisé les rivières Haut-Alpines après le retrait des glaciers, il y a environ 15 000 ans.

Depuis, chaque fin d’automne, des poissons adultes géniteurs se regroupent sous le jeu hormonal. Ils sont là pour accomplir le cycle de la vie. Depuis quelques jours, ces processus de reproduction ont débuté. Secrètement, discrètement, dans un spectacle tout aussi magique que fondamental, l’espèce se perpétue…

Choix, aménagement et surveillance d’une frayère

Les truites se rassemblent sur des secteurs de galets ou graviers, peu profonds, à courant faible et régulier. À intervalles assez constants, la femelle s’élance en se couchant sur le flanc. Elle ondule et ” nettoie ” le fond en soulevant un nuage de vase et de dépôts que le courant emporte. La femelle prépare ainsi une zone de reproduction en forme de cuvette, sorte de nid, appelée frayère.

Pendant ce temps, le mâle monte la garde, un peu en retrait. Il se précipite régulièrement sur les intrus qui sont de deux sortes : d’autres truites presque de mêmes tailles, des concurrents, et de petits individus immatures. Tous jouent la règle du jeu : le plus faible cède au plus agressif. La femelle interrompt parfois son travail pour chasser les intrus, mais elle semble tolérer le mâle dominant qui se tient en arrière d’elle.

Quand la frayère semble terminée, mâle et femelle se tiennent côte à côte, le mâle un peu en retrait. Le couple peut rester ainsi des heures, s’agitant par instant, s’éloignant parfois pour revenir presque aussitôt.

Une reproduction externe…

Soudain, la femelle posée sur la zone de frayère se raidit. Immédiatement, le mâle se précipite contre elle. Ils sont tous deux saisis de violents tremblements et ouvrent largement la gueule. L’émission des gamètes dans l’eau se produit, la reproduction est externe. La fécondation des œufs arrosés par la semence du mâle se fait rapidement (moins d’une minute). Les œufs fécondés tombent sur les graviers. Ils sont gros comme des petits pois – 4 à 5 mm de diamètre environ – de couleur miel orangée. Une femelle en pond 1000 à 1500 par kilo de son propre poids. Elle balaye ensuite vivement le substrat environnant avec sa queue à plusieurs reprises pour recouvrir les œufs de graviers protecteurs. Les géniteurs exténués quittent rapidement la place et ne s’occuperont pas de leur progéniture.

Comme tous les œufs n’arrivent pas à maturité en même temps, la ponte d’une femelle s’effectue généralement en plusieurs fois, à quelques jours d’intervalle.

Moment d’espoir pour la rivière !

De multiples paramètres détermineront le succès de la reproduction (parfois malheureusement impactée par les pathologies, la prédation, le colmatage, les éclusées, etc.). Dans le meilleur des cas, les alevins émergeront au bout de 8 à 10 semaines en fonction de la température de l’eau, puis resteront à l’abri des graviers encore quelques semaines, le temps de finir leurs réserves vitellines. Ils migreront alors vers l’aval pour trouver un territoire et se nourrir seuls de petits invertébrés aquatiques.

Même si très peu survivront et se reproduiront à leur tour, ce temps d’euphorie est un véritable espoir pour la rivière. Moment précieux car fragile et essentiel, son seul succès garantit le maintien de la vie dans nos cours d’eau.

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